2010/01/31

Bernard Saladin d'Anglure

50 ANS
D’ESTAMPE
& SCULPTURE INUIT
Contes et mythologie
08 mai 2010
03 octobre 2010


Le célèbre anthropologue Bernard Saladin d'Anglure écrira les textes de notre revue " En puisaye " chez RLD éditions, qui sortira en mai et qui accompagnera l'exposition, au Centre d'art Graphique de la Métairie Bruyère.

Claud Baud, grand collectionneur d'estampe inuit en Europe écrira la préface.


Après cinquante années de recherches dans l’Arctique canadien, Bernard Saladin d’Anglure offre à ses proches, à ses informateurs disparus ou vivants, mais aussi au grand public, un premier ouvrage sur les mythes d’origine de la vie humaine chez les Inuit, sur les mythes de différentiation des sexes ou encore sur la relation entre humains et monde animal. Grande synthèse de la kyrielle d’articles scientifiques rédigés au cours de sa carrière, cet ouvrage est un bouquet de mythes et de récits mythiques explicités et commentés, confrontés avec d’autres variantes régionales. Le texte entrelace les commentaires au mythe, rendus distincts par l’usage de deux polices différentes, si bien que le lecteur non initié à la mythologie inuit en saisit rapidement les grandes structures et peut pénétrer progressivement dans la pensée inuit. Les initiés regretteront cependant de ne pas avoir accès à la version inuktitut de ces récits et à leurs conditions de production.

2Lors de son premier séjour dans la communauté d’Iglulik en 1971, l’objectif de l’auteur était d’étudier la conception inuit de la reproduction de la vie et les règles et mythes liés à la socialisation des enfants. Le révérend Noah Nasuk lui conseilla alors de rencontrer les aînés Ujarak et Iqallijuq. Magie du terrain, Saladin d’Anglure reconnut en eux le fils du chamane Ava, interrogé par Knud Rasmussen pendant la cinquième expédition de Thulé, en 1922, et l’épouse qui lui était promise à l’époque. À ces deux informateurs exceptionnels s’ajouta un troisième, Kupaaq, grand conteur, aîné des petits-enfants d’Ataguttaaluk, la « reine d’Iglulik », femme devenue chamane après avoir survécu à une famine en mangeant les cadavres de son premier mari et de ses enfants.

3Les mythes et récits de ce livre proviennent en grande partie d’entretiens menés en inuktitut et enregistrés en 1972 et 1973 avec ces trois précieux informateurs. Ils sont complétés, entre autres, par les versions recueillies par Knud Rasmussen, pendant la cinquième expédition de Thulé, et par celles publiées par Franz Boas (recueillies par l’intermédiaire du capitaine Comer à la fin du xixe siècle). Le texte débute et s’achève sur des récits de souvenirs intra-utérins dont l’auteur a cherché à montrer la spécificité en tant que nouveau genre narratif. Bernard Saladin d’Anglure ne développe pas ici d’argumentaire, mais montre, au gré du récit, comment se composent les structures caractéristiques de ces souvenirs et leurs procédés de narration. L’expérience intra-utérine est marquée par une acuité sensorielle et une clairvoyance propre au fœtus. Celui-ci conserve les souvenirs, les caractéristiques et les compétences de l’âme-nom qu’il réincarne. Le récit est également marqué par un changement d’échelle, passage de la vie fœtale au monde humain : le fœtus perçoit l’utérus comme un petit iglu. Le locuteur se remémore avoir, à plusieurs reprises, aperçu la tête d’un chien (pénis du père) s’engouffrant dans l’entrée et vomissant un liquide dont il se nourrissait. Le moment de la naissance approchant, il se souvient d’une sensation d’étroitesse dans l’utérus ; ce dernier est alors comparé à un iglu de neige qui, subissant l’arrivée du printemps, se met à fondre. Prolongeant la piste suggérée par Claude Lévi-Strauss, Saladin d’Anglure explore l’idée que, chez les Inuit, les niveaux ontologique, sociologique et cosmologique procèdent de mêmes structures, à des échelles et dans des contextes différents. Le passage d’un niveau à l’autre se révèle cependant source de dangers. De nombreux mythes réunis dans cet ouvrage font valoir que l’union entre un humain et un animal ou un esprit (adoption, alliance matrimoniale ou procréation) s’avère périlleuse. C’est le cas, par exemple, de cet homme uni à une femme-outarde et qui fera l’expérience de l’impossibilité de leur relation conjugale tout au long d’un parcours semé d’obstacles à symbolique féminine (lampe à huile, marmite et paire de cuisses géantes). Construit sur une série d’oppositions (nord/sud, froid/chaud, homme/femme, etc.), ce récit évoque la séparation des sexes et celle nécessaire entre monde humain et monde animal. La seule personne autorisée à en transcender les différentes échelles était le chamane ou « troisième-sexe » selon la terminologie de l’auteur.

4L’auteur entremêle temps mythique et temps historique (histoire, culture, pratiques). Il évite de subordonner l’un à l’autre et ne cherche pas non plus à isoler une expression figée et authentique du mythe. Il travaille à partir de l’atemporalité du mythe et de sa forme mobile et réempruntable. Toutefois, à cet ouvrage, il manque une discussion sur le rapport entre mythe et histoire. On regrettera en effet l’absence de précisions sur l’inscription de ces récits dans leur contexte historique, sur leurs conditions d’énonciation, sur le rapport à la tradition, à la mémoire et à l’oubli. Il n’en demeure pas moins, comme le souligne Claude Lévi-Strauss dans l’émouvante préface dont il l’honore, que de cet ouvrage se dégagent la richesse des terrains assidus et l’intimité peu à peu tissée avec la société d’accueil.


Caroline Hervé, « Saladin d’Anglure Bernard, Être et renaître inuit. Homme, femme ou chamane (préface de Claude Lévi-Strauss), Gallimard, coll. « Le langage des contes », Paris, 2006, 429 p. + 8 p. de pl. N&B, bibl., gloss., ill. », Journal de la société des américanistes [En ligne], 2007, 93-1, mis en ligne le 23 janvier 2008, Consulté le 31 janvier 2010. URL : http://jsa.revues.org/index7263.html

2010/01/05

One week to Madrid:)


Une bonne semaine à Madrid, superbe ville, content d'y avoir vu des Vélasquez, Picasso et Miro, mais tout de même, j'ai été nettement moins emballé que Barcelone....
Retour au Centre d'art bientot ;)